Une solution : la brigade des émotions Comment apprendre aux enfants à mieux gérer leurs émotions ? En leur faisant comprendre qu’elles existent et qu’elles peuvent être nommées. C’est un peu l’idée de départ et la méthodologie choisies par une équipe des services à la population de Loches Sud Touraine pour apaiser les tensions, mettre un peu d’huile dans les rouages et favoriser le vivre-ensemble en milieu scolaire. « Après des temps d’échange avec les équipes pédagogiques pour mieux cerner les problèmes rencontrés, nous avons associé plusieurs compétences et défini un projet expérimental d’accompagnement des enfants » raconte Fleur Renault, animatrice du LAP’S, l’Espace Parents. Avec Éloise Breil, responsable enfance-jeunesse, Frédéric Proux, coordinateur enfance et Laëtitia Chéreau, cheffe de projet santé, ils ont allié leurs compétences pour monter une « brigade des émotions » et pour travailler sur les aptitudes comportementales des enfants, ce qu’on appelle les « compétences psychosociales ». Des mots sur les maux Une première expérimentation concrète a eu lieu début janvier dans les murs de l’école de Chambourg-sur-Indre. Deux petits groupes d’une dizaine d’élèves chacun, allant du CP au CM2, ont été incités par les équipes de la « brigade » à définir les émotions qu’ils ressentaient au moment du repas à la cantine, un temps contraint et soumis à des interactions sociales parfois vives. Une fois les choses posées grâce à un « livret d’émotions » ludique et pédagogique, une réflexion a été menée avec les enfants pour qu’ils puissent mieux comprendre et gérer leur va-et-vient émotionnels. L’expérience sera renouvelée une fois par mois jusqu’en juin, date à laquelle un bilan sera effectué en compagnie de toutes les parties prenantes, avant une possible déclinaison de ce dispositif dans d’autres établissements scolaires ou accueils de loisirs. Car il y a visiblement un vrai besoin, exprimé par les enfants et par les équipes pédagogiques, d’être accompagnés et aidés par des intervenants extérieurs. « Lors des premiers ateliers, nous avons ressenti beaucoup de tensions et de fatigue, avec finalement peu de temps pour se poser, échanger des impressions et coordonner des solutions », explique Fleur Renault. Des solutions qui ne sont d’ailleurs pas circonscrites à celles apportées par la « brigade des émotions », bien consciente qu’elle ne va pas régler tous les problèmes. En parallèle du projet mené à l’école, un café-parents organisé par le LAP’S et animé par une psychologue se tient une fois par mois à Chambourg-sur-Indre pour offrir aux parents un espace d’échanges. mes émotions « Fédérer tous les acteurs du service public » Catherine Large, inspectrice de l’Éducation Nationale dans la circonscription de Loches La question du bien-être des enfants en milieu scolaire est-elle devenue une problématique majeure pour l’Éducation Nationale ? Catherine Large : Oui, on constate une dégradation globale de la santé mentale des enfants. À l’échelle de la circonscription de Loches, je constate effectivement une augmentation du mal-être des enfants, qui se traduit par une hausse des faits de violence. Les enfants ont du mal à vivre ensemble, à se concentrer, à gérer la frustration et, globalement, la vie en collectivité. Selon vous, à quoi ce mal-être grandissant est-il dû ? CL. : Pour certains, il y a clairement un effet post-Covid avec des enfants qui, confinés, n’ont pas bénéficié pendant un temps d’un apprentissage en collectivité. Après, l’école est le reflet de la société actuelle. Les parents sont peut-être un peu plus perdus aujourd’hui sur la place de l’enfant dans la famille, mais peut-être aussi plus inquiets, car des sujets comme la lutte contre le harcèlement ont été très médiatisés. Il n’est pas facile de passer du statut de parent d’enfant à celui de parent d’élève. Mais on a besoin d’eux pour faire avancer les choses. À son niveau, que fait l’Éducation Nationale ? CL : Je pense déjà que nous avons besoin de tous les acteurs du service public. À son niveau, l’Éducation Nationale met en place des formations à destination des personnels concernant par exemple l’accompagnement des situations complexes d’élèves, la lutte contre le harcèlement scolaire ou la communication non violente. Faut-il plus de personnel ? CL : Avoir du personnel supplémentaire serait un plus, mais les moyens humains ne règleront pas tout si l’on ne s’empare pas des outils existants en termes de formation, d’action et d’accompagnement. en commun • hiver 2025 9 agir ensemble
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